dimanche 10 juillet 2011

Marcel Dadi (My family in MassaPequa)

Magnifique composition du grand Marcel Dadi.
Il se peut, si j'ai le courage de le faire, que je mette la "partoche" au format Muse score. A suivre. Ca sera intéressant car je l'écrirai en bon solfège. Tel que ça doit s'écrire. L'avantage de ce style de soft c'est de permettre dé vérifier en lecture informatique que ça correspond avec le morceau joué par l'auteur. En effet le Finger Picking est très particulier rythmiquement... et ce morceau swing particulièrement. Peu de musiciens le savent mais le swing s'écrit. C'est un rythme prévu de longue date. Simplement c'est très chargé graphiquement alors on a pris le parti de simplifier l'écriture. De + il est vrai que ceux qui ont inventé le swing ne voulaient pas s'embarrasser et se compliquer la vie puisque le swing est essentiellement un "feeling". Mais il s'écrit. Et c'est ce que nous verrons.




explications de My family in Massa Pequa par erico8686

jeudi 7 juillet 2011

Schopenhauer l'incompris


Par Roger-Pol Droit (pour le journal Le Monde)

Voilà un jeune homme qui ne doute de rien ! Personne ne le connaît, presque personne ne sait qu'il a publié, il y a quelques mois, chez Brock- haus, un gros ouvrage en deux volumes au titre énigmatique : Le Monde comme volonté et comme représentation. Et voilà que cet inconnu, âgé de 32 ans seulement, se met en tête de faire concurrence à Hegel, le grand maître de l'université de Berlin, le génie de la philosophie universitaire, de la philosophie allemande, peut-être de la philosophie tout court. Ce dénommé Arthur Schopenhauer insiste : le doyen de la faculté de Berlin placera son cours aux mêmes jours et aux mêmes heures que celui de Georg Friedrich Hegel.

Cet ambitieux n'a pas encore soutenu sa thèse, mais il fait déjà annoncer son enseignement. Et l'annonce n'est pas des plus modestes : "Arthur Schopenhauer exposera toute la philosophie, c'est-à-dire la théorie de l'essence de l'univers et celle de l'esprit humain." Durée prévue : vingt-quatre semestres !

Il est vrai que Schopenhauer voue à Hegel et à son système une haine intense. Alors que toute l'Allemagne célèbre la philosophie de l'histoire de Hegel, sa méthode dialectique, la marche de l'Esprit à travers les époques et les peuples, la réconciliation de la philosophie et de la religion chrétienne, ce jeune effronté ne voit chez ce maître illustre qu'un "charlatan plat, sans esprit, répugnant, ignorant",dont la philosophie est une "colossale mystification". A ses yeux, elle constitue "le verbiage le plus creux (...), le galimatias le plus stupide qui ait jamais été entendu, du moins en dehors de maisons de fous".

Comment ce verbiage pompeux, qui produit "le plus grand encrassement possible des intelligences", a-t-il pu valoir à son auteur tant de notoriété et de pouvoir ? Cette "gloire mensongère, captée, achetée, produit d'un tissu de faussetés", est malgré tout une gloire : les auditeurs se pressent en foule au cours de Hegel. Ils sont environ deux cents, arrivant longtemps à l'avance pour être certains d'avoir une place et de bien entendre, car Hegel ne parle pas très fort et possède surtout un accent souabe à couper au couteau que l'on a du mal, à Berlin, à bien saisir. Il y a là des étudiants et des professeurs, évidemment, mais aussi des médecins, des assureurs, des fonctionnaires, des employés. Par dizaines. Et voilà qu'à la même heure, au cours de Schopenhauer, ils sont cinq.

Schopenhauer croit savoir pourquoi ils sont si nombreux à répéter les mots creux de Hegel. "Le charlatan de la métaphysique"fait l'éloge de l'Etat prussien et le jeu du gouvernement, il a donc aujourd'hui "pour complices intéressés les charlatans de la politique". Tous ces gens aiment se gaver de mots vides, et comme les termes creux ("l'Absolu", "l'Être", "la négation de la négation"...) permettent cette fois de faire carrière, le succès est assuré.

Il l'est même d'autant mieux que cette pensée prétendument nouvelle, en lieu et place de philosophie, reprend tels quels "les grands principes de la religion du pays, que chacun a sucés avec le lait maternel".

Schopenhauer est aux antipodes de tout cela. Allemand de naissance, il est européen de culture et d'esprit. Son père, Floris, grand commerçant de Dresde et de Hambourg, lisait le Times chaque jour, et a envoyé Arthur, à 9 ans, au Havre, pour qu'il apprenne le français chez un confrère et ami. D'ailleurs, s'il a prénommé son fils Arthur, c'est que ce prénom est identique dans la plupart des langues européennes. Schopenhauer ne s'est jamais coulé dans le moule universitaire. Il n'est pas du sérail. Sa détestation envers Hegel s'étend aux professeurs de philosophie et demeure vivace toute sa vie. Vers la fin, il eut cette formule : "Que bientôt les vers doivent ronger mon corps, c'est une pensée que je puis supporter ; mais que les professeurs rongent ma philosophie, cela me donne le frisson !" En outre, cet amoureux du mot juste s'exprime toujours clairement, en styliste qui sait argumenter et convaincre. Enfin, peut-être surtout, ce fils des Lumières est athée, totalement et résolument. Il tient les religions pour des illusions, les prêtres pour ennemis.

Cela ne l'empêche pas de s'intéresser à la mystique, aux saints, aux ascètes et aux renonçants, de se passionner précocement pour les doctrines de l'Inde, de s'enflammer pour le bouddhisme quand les savants vont commencer à le faire connaître. Il est le premier philosophe à mettre les Veda et les Upanishad sur le même plan que Platon et que Kant. Mais, plus que tout, Schopenhauer a le culte de la vérité. Il croit profondément, presque religieusement, en la philosophie. Il est convaincu qu'elle doit parvenir à comprendre l'existence et peut remédier, au moins pour certains, au désordre qui y règne. "La vie est chose malaisée, j'ai pris la résolution de consacrer la mienne à y réfléchir", a-t-il écrit à 23 ans. En un sens, il a tenu parole. Après la mort de son père, pouvant vivre de ses rentes, il a repris des études, a laissé mûrir en lui sa propre philosophie, a passé près de cinq ans à rédiger son œuvre fondamentale, sa pensée unique, et l'a publiée.

Depuis, il attend. Quoi au juste ? Que la vérité soit enfin reconnue, et que soit glorifié celui qui l'a découverte et exprimée, en deux gros volumes, chez Brockhaus. Mais rien ne se passe, personne ne lit, aucun compte rendu ne paraît, la solution du problème de l'existence ne suscite qu'un silence indifférent et, pour Schopenhauer, insupportable. Le cours, qu'il inaugure à Berlin en cette année 1820, revêt donc pour lui une importance capitale. Il croit, naïvement mais intensément, que proclamer la vérité va tout changer. Les auditeurs quitteront certainement le cours de Hegel, qui finira vite par se taire. L'humanité se mettra à comprendre, même les professeurs vont changer d'idées ! Pourtant, au bout d'un semestre, ils ne sont toujours que cinq. Au semestre suivant, le cours n'a pas lieu, faute d'auditeurs. Il en ira de même par la suite. Au bout de deux années, l'annonce disparaît.

Le contrecoup de cet échec est particulièrement rude pour le jeune philosophe. Il a beau demander à l'un de ses amis de surveiller les "endroits où l'on parle (de lui) dans des livres, des journaux, des revues littéraires", rien ne se dit. Il en tombe malade, doit garder le lit plusieurs mois, pour des troubles mal identifiés qui ressemblent à un épisode dépressif. Il se demande s'il est encore à la hauteur de sa propre pensée, s'il pourra poursuivre. Il a le sentiment d'avoir déjà fait son temps, d'avoir perdu tout avenir, sans que personne ait pris conscience de sa valeur. Heureusement, l'homme a de la ressource. Son amertume se transforme vite en sarcasme, et en autoglorification. Après tout, il ne s'adresse qu'à la postérité, non à "la foule des singes".

"Ils n'ont pas daigné m'écouter ; mais le temps qui marche fera tout paraître au grand jour", écrit-il pour se remettre de l'échec de son cours. Il se répète qu'en fait il ne dialogue qu'avec les siècles et ne s'adresse qu'à la postérité. Il vaut mieux, quand même, se le répéter régulièrement. Ce ressassement aide, quand on est aussi seul qu'il peut l'être, durant tant de temps. En fait, cet échec n'existe pas, il s'agit seulement d'un gigantesque malentendu. Schopenhauer n'a qu'une identité, marquée intérieurement du sceau de la victoire. Il note, en 1823, dans son carnet de brouillon secret : "Si, par moments, je me suis senti malheureux, ce fut alors par suite d'une méprise, d'une erreur sur la personne, je me suis pris pour un autre que celui que je suis, et je me lamentais sur les misères de cet autre : par exemple, je me suis pris pour un chargé de cours qui n'est pas promu titulaire de chaire et qui n'a pas d'auditeurs (...) . Je suis celui qui a écrit Le Monde comme volonté et comme représentation et qui a apporté une solution au grand problème de l'existence. (...) C'est celui-là, moi, et qu'est-ce donc qui pourrait inquiéter celui-là dans les années qui lui restent encore à vivre ?"

Rien ne l'inquiète donc plus. Ni ses échecs sentimentaux ni les querelles avec sa mère Johanna, amie de Goethe, romancière à succès dont, en 1831, on édite les œuvres complètes en 24 volumes. Pas même le nombre très faible d'exemplaires de son grand œuvre écoulés en dix ans. Sur un tirage de 800 exemplaires en 1819, l'éditeur en a encore 150 en magasin en 1828, mais un bon nombre a été mis au rebut. Schopenhauer tente encore de se faire connaître comme traducteur, puis finit par renoncer. Il attend, à Francfort, menant sa vie réglée de rentier célibataire, flûte le matin, travail, promenade avec son caniche et baignade dans le Main, quelle que soit la saison. Il attend que la postérité le rejoigne. Et cela dure trente ans ! Trente ans de silence presque total, de 1823 à 1853. "Si j'étais roi, l'ordre que je donnerais le plus souvent et avec le plus d'insistance serait celui-ci : "Laissez-moi seul !"" Pour donner cet ordre, il lui a suffi de développer sa pensée. Elle a tout, en effet, pour faire le vide autour de lui.

Dans un siècle marqué par le triomphe de l'histoire, les contrecoups de la Révolution française et la montée des révoltes, Schopenhauer est bien le seul à proclamer avec tant de force qu'il n'y a rien à attendre des événements. La condition humaine, à ses yeux, est toujours continûment la même. Quelle que soit l'époque, l'humanité est confrontée aux mirages du bonheur et aux réalités de la souffrance. "La race humaine est une fois pour toutes et par nature vouée à la souffrance et à la ruine." Voilà le secret de l'existence, qui n'est pas vraiment joyeux. Nos aspirations, nos raisonnements, nos créations sont traversés par une force qui nous échappe, la Volonté, qui agit en nous comme dans la Nature, y compris dans la matière inanimée. Tout ce que veut la vie, c'est se poursuivre, persister. La volonté singulière d'un individu n'a qu'une existence illusoire, elle est de toutes parts immergée dans le jeu infini et absurde d'une réalité qui la dépasse et finit par la détruire.

Difficile, en apparence, de devenir populaire quand on professe un pessimisme aussi noir que celui de Schopenhauer. A ses yeux, l'Enfer de Dante n'est rien d'autre que l'existence telle que nous la connaissons, bien que nous fassions tout pour mentir et oublier. "Les efforts sans trêve pour bannir la souffrance n'ont d'autre résultat que d'en changer la figure." Ou encore : "Aujourd'hui est mauvais, et chaque jour sera plus mauvais, jusqu'à ce que le pire arrive." Malgré tout, cette pensée caustique, solitaire et parfois farouche, orpheline de toute consolation divine, finit par rencontrer, dans l'Europe des années 1850, un écho qui ira grandissant jusqu'à la fin du siècle. Schopenhauer devient l'éducateur de la modernité, au point que pratiquement tous les créateurs, à la charnière du XIXe et du XXe siècle, portent l'empreinte de Schopenhauer, de Proust à Kandinski, de Strindberg à Dürrenmatt, de Maupassant à Nietzsche, de Wagner à Kafka. Peut-être n'y a-t-il aucun philosophe qui ait exercé sur la vie artistique et culturelle une influence si profonde et si durable. Que lit, à Londres, en 1916, un comédien obscur du nom de Charlie Chaplin, qui s'en trouve bouleversé ? Le Monde comme volonté et comme représentation.

A la fin de sa vie, le philosophe assiste, mi-ému et mi-moqueur, au commencement de ce triomphe : portraits, bustes, visites, études. Voilà qu'on donne des cours sur sa pensée, alors que Hegel a de moins en moins de disciples... Est-il heureux ? Ce serait étrange, de la part de celui qui soutient qu'"une vie heureuse est une contradiction dans les termes". A l'un de ses visiteurs, il déclare : "Je me sens étrange, avec mon actuelle gloire. Il vous est certainement déjà arrivé de voir, avant une représentation théâtrale, un lampiste encore occupé à la rampe, présent au moment où la salle devient obscure, et disparaissant rapidement dans les coulisses - à ce moment où se lève le rideau. Voilà ce que je ressens être, un attardé, un survivant, alors qu'on donne déjà la comédie de ma gloire." Il rejoint les coulisses le 21 septembre 1860. Depuis, la pièce continue.

En savoir plus

- Pour une première découverte, on se reportera au Schopenhauer de Didier Raymond (Seuil, "Ecrivains de toujours", rééd. 1995)

- La biographie la plus complète est celle de Rüdiger Safranski, Schopenhauer et les années folles de la philosophie (PUF, "Perspectives critiques", 1990)

- L'œuvre maîtresse de Schopenhauer, Le Monde comme volonté et comme représentation, est disponible en traduction française aux Presses universitaires de France.

- Une bonne traduction française de sa Correspondance complète a été publiée en 1996 aux éditions Alive.

Source : http://www.lemonde.fr

mercredi 6 juillet 2011

Faire la pluie et le beau temps

Emission de Télématin : les russes connaissent et utilisent cette technique d'épandage pour maîtriser le climat


Modification du climat en Russie ! par ActuChem

mardi 5 juillet 2011

Arthur Schopenhauer (Thèse de doctorat) (2)

Ce texte de jeunesse est présenté par Schopenhauer dans son oeuvre majeure, "Le monde comme volonté et représentation", comme un pré-requis. Il y fait allusion souvent. Expliquant qu'il ne compte pas revenir sur ce qu'il a déjà expliqué ici. Cela prouve a quel point il est conscient et certain d'avoir trouvé une/la vérité
"DE LA QUADRUPLE RACINE 
DU PRINCIPE DE LA RAISON SUFFISANTE"

CHAPITRE PREMIER

INTRODUCTION


§ 1. LA MÉTHODE.

Platon le divin et l'étonnant Kant recommandent,d'une voix unanime et impérieuse, la règle suivante comme méthode pour toute discussion philosophique, pour toute connaissance même(1) Il faut, disent-ils, satisfaire à deux lois, celle de l'homogénéité et celle de la spécification, à toutes les deux dans la même mesure et non pas à l'une seulement au détriment de l'autre.

La loi de l'homogénéité nous enseigne, par l'étude attentive des ressemblances et des concordances, à concevoir les espèces, à grouper celles-ci en genres et ces derniers en familles , jusqu'à ce que nous arrivions à la notion suprême qui comprend tout.

Cette loi étant transcendantale, et essentielle à notre raison, présuppose sa concordance avec la nature ; c'est ce qu'exprime cet ancien précepte : «Entia praeter necessitatem non esse multiplicanda.» — Par contre, Kant énonce ainsi la loi de la spécification : «Entium varietates non temere esse minuendas.

Celle-ci exige que nous séparions scrupuleusement les genres groupés dans la vaste notion de famille, de même que les espèces supérieures et inférieures, comprises dans ces genres ; elle nous impose d'éviter avec soin les sauts brusques et surtout de ne pas faire entrer directement quelque espèce dernière, et à plus forte raison quelque individu, dans la notion de famille; car toute notion est susceptible d'être encore subdivisée en notions inférieures, et aucune ne descend jusqu'à l'intuition pure.

Kant enseigne que ces deux lois sont des principes transcendants de la raison et qu'elles réclament à priori l'accord avec les choses : Platon semble énoncer, à sa façon, la même proposition quand il dit que ces règles auxquelles toute science doit son origine nous ont été jetées par les dieux du haut de leur siège, en même temps que le feu de Prométhée.

§ 2. SON APPLICATION dans le cas PRESENT.

Malgré d'aussi puissantes recommandations, la seconde de ces lois a été, selon moi, trop peu appliquée à un principe fondamental de toute connaissance, au principe de la raison suffisante. En effet, quoiqu'on l'ait dès longtemps et souvent énoncé d'une manière générale, on a négligé de séparer convenablement ses applications éminemment différentes, dans chacune desquelles il adopte une autre signification, et qui montrent par là qu'il prend sa source dans des facultés intellectuelles distinctes.

Or, si l'on compare la philosophie de Kant avec toutes les doctrines antérieures, on peut se convaincre que c'est surtout dans l'étude des facultés intellectuelles que l'application du principe de l'homogénéité, lorsqu'on a négligé d'appliquer en même temps le principe opposé, a produit de nombreuses et longues erreurs ; et que c'est par contre en appliquant la loi de spécification que l'on a obtenu les progrès les plus grands et les plus importants.

Que l'on me permette donc, car cela donnera de l'autorité au sujet que je me propose de traiter, de citer ici un passage où Kant recommande d'appliquer aux sources de nos connaissances le principe de la spécification.

Il est la plus haute importance, dit-il, d'isoler les connaissances qui, par leur nature et leur origine, diffèrent entre elles, et de se bien garder de les laisser se confondre avec d'autres connaissances auxquelles elles sont jointes d'ordinaire dans la pratique.

Ainsi que procède le chimiste pour l'analyse de la matière, ou le mathématicien pour l'étude des mathématiques pures; ainsi, et plus rigoureusement encore, doit procéder le philosophe pour pouvoir déterminer sûrement la valeur et l'influence qui appartiennent en propre à telle ou telle espèce particulière de connaissance, dans l'emploi vague de l'entendement. (Critique de la raison pure, Etude de la méthode, 3e div. pr. (2))

§ 3. Utilité de cet examen.

Si je réussis à démontrer que le principe qui fait l'objet de cette étude découle dès l'abord de plusieurs connaissances fondamentales de notre esprit et non directement d'une seule, il en résultera que le principe de nécessité qu'il emporte avec soi comme principe établi priori ne sera pas non plus unique et partout le même, mais qu'il sera aussi multiple que les sources du principe lui-même.

Cela étant, quand on voudra baser une conclusion sur ce principe, l'on sera tenu de spécifier bien exactement sur laquelle des diverses nécessités, formant la base du principe, la conclusion s'appuie, et de désigner cette nécessité par un nom spécial, comme je vais en proposer plus loin. Les discussions philosophiques y gagneront, je l'espère, en netteté et en précision ; pour ma part, je considère qu'en philosophie la plus grande clarté possible, cette clarté que l'on ne peut obtenir que par la détermination rigoureuse de chaque expression, est la condition impérieusement exigée pour éviter toute erreur et tout risque d'être trompé avec préméditation : ainsi seulement, toute connaissance acquise dans le domaine de la philosophie deviendra notre propriété assurée.

En général, le véritable philosophe s'efforcera sans cesse d'être clair et précis ; il cherchera toujours à ressembler non pas à un torrent qui descend des montagnes, trouble et impétueux, mais plutôt à un de ces lacs de la Suisse, très profonds, auxquels leur calme donne une grande limpidité et dont la profondeur est rendue visible par cette limpidité. «La clarté est la bonne foi des philosophes,» a dit Vauvenargues.

Le faux philosophe, au contraire, ne cherche pas, selon la maxime de Talleyrand, à employer les mots pour dissimuler ses pensées, mais bien pour couvrir,le manque de pensées : il rend responsable l'intelligence du lecteur, quand celui-ci ne comprend pas des philosophèmes dont l'incompréhensibilité ne provient que de l'obscurité des propres pensées de l'auteur. Ceci explique pourquoi certains ouvrages, ceux de Schelling par exemple, passent si souvent du ton de l'enseignement à celui de l'invective : on y tance par anticipation le lecteur pour son ineptie.

§ 4. IMPORTANCE DU principe de LA RAISON suffisante.

Cette importance est immense ; on peut dire que ce principe est-la base de toute science. Car on entend par science un système de connaissances, c'est-à-dire un ensemble composé de connaissances qui s'enchaînent les unes aux autres, par opposition à un simple agrégat. Mais qu'est-ce qui relie entre eux les membres d'un système, si ce n'est le principe de la raison suffisante? Ce qui distingue précisément toute science d'un simple agrégat, c'est que chaque connaissance y dérive d'une connaissance antérieure, comme de son principe. [citation en grecque de Platon].

En outre, presque toutes les sciences renferment des notions de causes dont on détermine les effets, et d'autres notions sur la nécessité des conséquences, qui découlent d'un principe, ainsi que nous le verrons dans le cours de cette étude [citation d'Aristote en Latin] Or, comme nous avons admis à priori que tout a une raison d'être qui nous autorise à chercher partout le pourquoi, on peut dire à bon droit que le pourquoi est la source de toute science.

§ 5. DU PRINCIPE LUI-MÊME.

Nous montrerons plus loin que le principe de la raison suffisante est une expression commune à plusieurs connaissances' données à priori. Néanmoins, il faut bien pour le moment le formuler d'une manière quelconque. Je choisis la formule de Wolf, comme étant la plus générale : «Nihil est sine ratione cur potius sit, quam non sit.»
Rien n'est sans une raison d'être(3).

(1) Platon, Phileb., p. 219-223. Polit., 62, 63; Phoedr., 361-363, éd. Bipont. — Kant, Critique de la raison pure, annexe à la dialect. transc.
(2) «afin de pouvoir déterminer sûrement la part de chaque espèce de connaissance, a l'usage vagabond de l'entendement, sa valeur propre et son influence.» Crit. de la R. P., traduction de M. Tissot. Voir tome II, p. 542. (Paris, Ladrange, 1845.) qu'aucun malentendu, aucune équivoque, découverts parla suite, ne pourront plus venir nous arracher.
(3) J'ai traduit littéralement la version libre de Schopenhauer : «Nichts ist ohne Grund warum es sei.»


Source : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5400813b

lundi 4 juillet 2011

A la recherche du créateur


1 _3 voyage dans l'espace temps... par grandeetoile


2_3 voyage dans l'espace temps... par grandeetoile


3_3 voyage dans l'espace temps... par grandeetoile

Arthur Schopenhauer (Thèse de doctorat) (1)


Ce texte de jeunesse est présenté par Schopenhauer dans son oeuvre majeure, "Le monde comme volonté et représentation", comme un pré-requis. Il y fait allusion souvent. Expliquant qu'il ne compte pas revenir sur ce qu'il a déjà expliqué ici. Cela prouve a quel point il est conscient et certain d'avoir trouvé une/la vérité

Préface de la seconde édition de 

"DE LA QUADRUPLE RACINE 
DU PRINCIPE DE LA RAISON SUFFISANTE"


Cette dissertation de philosophie élémentaire a paru pour la première fois en 1813, sous forme de thèse pour mon doctorat ; plus tard, elle est devenue le fondement de tout mon système. Aussi faut-il qu'elle ne soit jamais épuisée dans le commerce, comme c'est le cas, à mon insu, depuis quatre ans.

Mais il me semblerait impardonnable de lancer encore une fois dans le monde cette oeuvre de ma jeunesse, avec toutes ses taches et tous ses défauts. Car je songe que le moment ne saurait être bien loin où je ne pourrai plus rien corriger; c'est précisément avec ce moment que commencera la période de ma véritable influence, et je me console par l'espoir que la durée en sera longue; car j'ai foi dans la promesse de Sénèque : «Etiamsi omnibus tecum viventibus silentium livor indixerit, venient qui sine offensa sine gratia judicent» (Ep. 79).

J'ai donc corrigé, autant que faire se pouvait, le présent travail de ma jeunesse, et, vu la brièveté et l'incertitude de la vie, je dois m'estimer particulièrement heureux qu'il m'ait été donné de pouvoir réviser dans ma soixantième année ce que j'avais écrit dans ma vingt-sixième.

J'ai voulu néanmoins être très indulgent pour mon jeune homme et, autant que possible, lui laisser la parole et même lui laisser tout dire. Cependant, quand il avance quelque chose d'inexact ou de superflu, ou bien encore quand il omet ce qu'il y avait de meilleur à dire, j'ai bien été obligé de lui couper la parole, et cela est arrivé assez fréquemment ; tellement, que plus d'un lecteur éprouvera le même sentiment que si un vieillard lisait à haute voix le livre d'un jeune homme, en s'interrompant souvent pour émettre ses propres considérations sur le sujet.

On comprendra facilement qu'un ouvrage ainsi corrigé et après un intervalle aussi long, n'a pu acquérir cette unité et cette homogénéité qui n'appartiennent qu'à ce qui est coulé d'un jet. On sentira déjà dans le style et dans la manière d'exposer une différence si manifeste, que le lecteur doué d'un peu de tact ne sera jamais dans le doute si c'est le jeune ou le vieux qu'il entend parler.

Car, certes, il y a loin du ton doux et modeste du jeune homme qui expose ses idées avec confiance, étant assez-simple pour croire très sérieusement que tous ceux qui s'occupent de philosophie ne poursuivent que la vérité, et qu'en conséquence quiconque travaille à faire progresser celle-ci ne peut qu'être le bien venu auprès d'eux; il y a loin, dis-je, de cet on à la voix décidée, mais parfois aussi quelque peu rude, du vieillard qui a bien dû finir par comprendre dans quelle noble compagnie de chevaliers d'industrie et de plats et serviles courtisans il s'est fourvoyé, et quels sont leurs véritables desseins.

Oui, le lecteur équitable ne saurait me blâmer quand parfois l'indignation me jaillit par tous les pores; le résultat n'a-t-il pas démontré ce qui advient quand, n'ayant à la bouche que la recherche de la vérité, on n'est constamment occupé qu'à deviner les intentions des supérieurs les plus haut placés, et quand aussi, d'autre part, étendant aux grands philosophes le «e quovis ligno fit Mercurius», un lourd charlatan comme Hegel arrive, lui aussi, à passer tout bonnement pour un grand philosophe.

Et, en vérité, la philosophie allemande est couverte aujourd'hui de mépris, bafouée par l'étranger, repoussée du milieu des sciences honnêtes, comme une fille publique qui, pour un vil salaire, s'est donnée hier à celui-là, aujourd'hui à un autre ; les cervelles des savants de la génération actuelle sont désorganisées par les absurdités d'un Hegel : incapables de penser, grossiers et pris de vertige, ils deviennent la proie du vil matérialisme qui a éclos de l'oeuf du basilic. — Bonne chance à eux! — Moi, je retourne à mon sujet.

Il faut donc que le lecteur prenne son parti de la disparité de ton ; car je n'ai pas pu ajouter ici, en supplément séparé, les additions ultérieures, comme je l'ai fait pour mon.grand ouvrage.

Ce qui importe, ce n'est pas que l'on sache ce que j'ai écrit à vingt-six ou à soixante ans, mais que ceux qui veulent s'orienter, se fortifier et voir clair dans les principes fondamentaux de toute philosophie, trouvent, même dans ces quelques feuilles, un opuscule où ils puissent apprendre quelque chose de solide et de vrai : et ce sera le cas, je l'espère.

Par le développement que j'ai donné à certaines parties, l'ouvrage est même devenu une théorie résumée de toutes les facultés de l'intelligence ; cet abrégé, tout en n'ayant pour objet que le principe de la raison, expose la matière par un côté neuf et tout à fait particulier, et trouve ensuite son complément dans le 1er livre de mon ouvrage Le monde comme volonté et représentation, dans les chapitres du 2° volume qui se rapportent à ce sujet, et dans la Critique de la philosophie kantienne.

Arthur SCHOPENHAUER.
Francfort-sur-le-Mein, septembre 1847.


Source : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5400813b

vendredi 1 juillet 2011

Arthur Schopenhauer par Michel Onfray

Vers la moitié de la vidéo ça devient intéressant car ça concerne véritablement la thèse de Schopenhauer qui mérite vraiment d'être connue.

Un de ses concepts "puissants" est la notion qui dit que le monde est régit par la volonté. C'est cette volonté qui nous pousse. Nous la connaissons intimement car c'est ce que nous nommons l'instinct. Passionnant vraiment. Il a touché juste je pense.



A écouter les conférences de Onfray à l'université populaire de Caen. Schopenhauer construction d'un pessimisme. Contre histoire de la philosophie volume 11. Le top étant d'écouter tous les volumes. C'est prodigieusement enrichissant. Merci Onfray.